juger

6e édition

JUGER.

v. a.
■  Décider une affaire, un différend en qualité de juge. Juger un procès. Quand jugerez-vous cette affaire ? Bien juger. Mal juger. Juger définitivement. Juger précipitamment. Juger impartialement. Juger sur les pièces. Juger avec connaissance de cause. Juger contre droit et raison. Juger en dernier ressort. Juger les causes d’appel. Juger une requête civile. L’affaire est prête à juger, est en état d’être jugée, se jugera demain.
Prov. et fig., Juger sur l’étiquette du sac, ou absolument, sur l’étiquette, Porter son jugement sur quelque affaire, sur quelque personne, sans avoir examiné les pièces, les raisons. Vous y allez bien légèrement, vous jugez sur l’étiquette du sac. Il ne faut pas juger sur l’étiquette.
Juger une personne, Juger son procès. Je serai jugé demain. Je vous jugerai quand j’aurai vu les pièces. Juger par contumace. Il a été jugé, on l’a jugé à mort. On l’a jugé, il est absous. On dit dans un sens analogue, Dieu viendra juger les vivants et les morts.
Juger, signifie aussi, Décider comme arbitre, et comme étant choisi par ceux qui sont en différend. C’est notre arbitre, il nous jugera. Jugez-nous, je vous prie. Jugez ce coup-là. Je m’en rapporte à ce qu’il en jugera. Un coup difficile à juger. On l’emploie, dans le même sens, avec la préposition de. Regardez-nous jouer, vous jugerez des coups.
Il signifie encore, absolument, Reconnaître la convenance ou la disconvenance de deux idées. Dès que l’enfant est en état de raisonner et de juger.
Il signifie souvent, Se former, avoir, énoncer un avis, une opinion sur une personne ou sur une chose. Vous jugez cet homme trop sévèrement. Vous le jugez bien, c’est un vrai fripon. Vous me jugez fort mal, si vous avez une telle opinion de moi. Je l’ai jugé tel au premier abord. Juger un ouvrage, un tableau, une pièce de théâtre. C’est là nous juger témérairement. Les préventions nous empêchent de juger sainement. p. 81On l’emploie avec le pronom personnel, soit comme verbe réfléchi, soit comme verbe réciproque. Il se juge lui-même très-sévèrement. Nous nous jugeons rarement comme les autres nous jugent. Ce poëte s’est jugé lui-même dans sa préface. Ils ne se jugeaient pas l’un l’autre bien favorablement.
Il s’emploie souvent aussi, dans le sens qui précède, avec la préposition de, ou un équivalent. Juger des gens sur l’apparence, sur la mine. Juger de la pièce par l’échantillon. Je ne pouvais pas bien juger de la distance. Pour mieux juger de la chose, pour mieux en juger. Il juge mal des événements, parce qu’il n’en connaît point les véritables causes. Juger sainement des choses. On dit dans un sens analogue : L’œil juge des couleurs. L’oreille juge des sons. Etc.
Il signifie particulièrement, Décider du défaut ou de la perfection de quelque chose. Il juge bien de la poésie, de la peinture. Il juge mal de ces sortes de choses, il ne s’y connaît point. J’en jugerais comme un aveugle des couleurs.
Il signifie également, Décider en bien ou en mal du mérite d’autrui, de ses pensées, de ses sentiments, du motif de ses actions. Bien juger, mal juger de quelqu’un, ou de ses actions. Juger mal de son prochain. Il faut toujours bien juger de tout le monde. Vous en jugez légèrement, témérairement. Jugez favorablement de lui. Absolument : Ne jugez point, si vous ne voulez être jugé. Jugez équitablement.
Juger d’autrui par soi-même, Estimer les sentiments d’autrui par les siens. Jugez d’autrui par vous-même, et voyez si vous seriez bien aise qu’on se conduisît ainsi avec vous.
Juger, signifie aussi, Conjecturer. Si j’en juge par ce premier essai, nous réussirons. Je jugeai, à son air, qu’il était fort inquiet. Il n’est pas difficile de juger ce qui en arrivera. Je jugeai que telle chose arriverait. Que jugez-vous de cela ? Je ne sais qu’en juger.
Au Jeu de paume, Juger la balle, Prévoir où la balle doit tomber ; et, figurément et familièrement, Prévoir quel tour une affaire prendra.
Juger, signifie encore, Croire, estimer que, être d’avis, d’opinion que, etc. Si vous jugez qu’il puisse remplir cette mission. Si vous jugez qu’il en soit capable. Si vous l’en jugez digne. Le parti que vous jugerez le meilleur, le plus convenable. Que jugez-vous que je doive faire ? Je juge qu’il conviendrait de partir. Il n’a pas jugé à propos de s’y trouver. Jugez-vous cela nécessaire ? On a jugé nécessaire d’y pourvoir de bonne heure. On l’emploie aussi avec le pronom personnel, soit comme verbe réfléchi, soit comme verbe réciproque. Vous en jugez-vous capable ? Ils se jugèrent faits l’un pour l’autre.
Il signifie aussi, Se figurer, s’imaginer. Vous jugez, vous pouvez bien juger qu’il n’en fut pas fort content. Jugez combien je fus surpris. Jugez un peu de ma surprise. Jugez si je fus ravi de le voir. Jugez quelle fut ma joie. Il est aisé de juger d’où cela part.
Jugé, ée. participe.
En Jurispr., La chose jugée, se dit d’Un point de contestation qui a été jugé par les tribunaux. Il y a chose jugée quand… Le respect dû à la chose jugée. L’autorité de la chose jugée.
Jugement passé en force de chose jugée, Décision qui ne peut plus être réformée par aucune voie légale, attendu que la partie condamnée ne s’est pas pourvue dans le délai fixé.
Bien jugé, mal appelé ; mal jugé, bien appelé. Formules employées dans les arrêts, quand un juge supérieur confirme ou casse la sentence d’un juge subalterne. On dit substantivement, dans le même sens, Le bien jugé. Maintenir le bien jugé.
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