courre

3e édition

COURIR

ou

COURRE.

v. n. Conjugaison : Je cours, tu cours, il court. Nous courons. Vous courez. Ils courent. Je courois. Je courrai. Cours. Qu’il courre. Que je courusse.
■  Aller de vîtesse & avec impétuosité. Courir légérement. Courir de toute sa force. Ce cheval court vîte comme un cerf. Cet homme court comme un Basque. Courir, courre la poste. Il est parti, courez après. Courir à toute bride, à bride abattue, à toutes jambes. Je courrois grand risque si je me fiois à lui. Je courrai la même fortune que vous.
Courir, Signifie aussi quelquefois, Aller plus vîte que le pas. Vous allez trop vîte, vous ne marchez pas, vous courez. Courir au feu. Courir au Médecin. Courir au reméde.
On dit proverb. Quand un homme va en quelque lieu avec ardeur, avec joie, qu’Il n’y va pas, qu’il y court, qu’il y court comme aux noces.
On dit, Courir aux armes, pour dire, Prendre les armes en hâte pour quelque alarme, ou pour quelque occasion pressante.
Il se dit fig. De toute action précipitée, de tout ce qu’on fait trop vîte. Il faut aller bride en main, on ne fait pas les affaires en courant.
Ainsi l’on dit, d’Un homme qui lit, qui récite ou prononce, ou qui écrit trop vîte, qu’Il court. Lisez tout doucement, ne courez-pas. Il écrit cela en courant. Il ne faut pas dire son Bréviaire en courant.
On dit prov. Ce n’est pas le tout que de courir, il faut partir de bonne heure, pour dire, que Ce n’est pas assez de se hâter, mais que quand on veut réussir à une entreprise, il faut prendre ses mesures de loin.
On dit fig. qu’Un homme court à l’Evêché, court au bâton de Maréchal de France, court au Chapeau de Cardinal, &c. pour dire, qu’Il est dans le chemin de parvenir bien-tôt à l’Evéché, &c.
On dit, Courir à sa perte. Courir à sa ruine, à son malheur, pour dire, Se conduire d’une maniére à se perdre, à se ruiner promptement.
On dit, d’Un homme qui se ruine, qu’Il court à l’Hôpital.
On dit prov. Courir après son éteuf, pour dire, Prendre bien de la peine pour recouvrer un bien, un avantage, qu’on a laissé échaper. J’ai retenu cet argent-là par mes mains, parce que je ne veux pas courir après mon éteuf.
On dit, Courir après les honneurs, les richesses, &c. pour dire, Les rechercher avec ardeur.
Il est quelquefois actif, & signifie alors, Poursuivre à la course avec dessein d’attraper. Courir quelqu’un pour le prendre. Le courir l’épée dans les reins. On l’a couru comme un chien fou. Courre ou courir le cerf, le liévre, le daim. Il a droit de courir le cerf sur ses terres. Ce liévre a été souvent couru.
On dit, Courir un Bénéfice, pour dire, Envoyer un courrier à celui qui a la nomination du Bénéfice pour être le premier à le demander.
On dit aussi, Courir un Bénéfice, Courir une Charge, pour dire, Les poursuivre avec ardeur.
On dit en termes de chasse, Laisser courre, p. 395pour dire, Découpler les chiens après la bête.
On fait même un substantif des deux infinitifs, Laisser courre, Qui signifie le lieu où l’on découple les chiens. Quand ils furent au laisser courre.
On dit, d’Un beau pays commode pour la chasse, que C’est un beau courre.
On dit, Courre un cheval, pour dire, Le faire courre à toute bride, étant monté dessus. Voulez-vous courre votre cheval contre le mien ?
On dit fig. Courir fortune de … courir risque de … pour dire, Etre en péril de … Il court fortune d’être chassé, de perdre son bien. Il court fortune de la vie. J’ai couru de grands hazards. J’ai couru hazard de, &c. Vous courez risque. Ce mal peut bien m’arriver, j’en courrai le risque.
On dit, Courir même fortune, pour dire, Etre dans les mêmes intérêts, dans la même situation d’affaires.
On dit, qu’Un homme court une belle fortune, Quand il est en passe de parvenir à quelque chose de grand.
Courir, Signifie aussi, Ravager, piller. Ces Troupes ont couru une telle province. Les Pirates courent la mer. Courir le plat-pays.
On dit, Courir le bon bord, pour dire, Pirater.
On dit, Courir le pays, courir le monde, pour dire, Voyager. Il a bien couru le pays, couru le monde. Il a couru toute la France.
On dit absolument, Il a bien couru, pour dire, Il a bien voyagé.
On dit, Courir le bal, pour dire, Aller d’un Bal à un autre, aller en plusieurs assemblées où l’on danse.
On dit, Courir les ruelles, pour dire, Aller de visite en visite chez les Dames.
On dit, Courre ou courir sus, pour dire, se jeter sur quelqu’un pour le maltraiter, lui faire insulte, le tuer, par ordre de Justice, ou même dans une sédition. Tout le monde lui court sus. Les Paysans se sont soulevez & ont couru sus aux Troupes. Il y a un Arrêt qui enjoint aux Communes de courir sus aux gens de guerre qui s’éloigneront de leur route.
On dit, Courre, ou courir sur le marché de quelqu’un, pour dire, Enchérir sur un autre, tâcher, prétendre d’emporter ce qu’un autre marchande. Je voulois acheter cela, pourquoi venez-vous courir sur mon marché ?
On dit aussi fig. Courir sur le marché, courir sur les brisées de quelqu’un, pour dire, Vouloir emporter sur quelqu’un une chose à quoi il a prétendu le premier.
On dit aussi, Courir, Soit dans un véritable combat, soit dans quelque Tournoi, joûte, ou autre exercice semblable. Ils baissérent la lance, & coururent l’un contre l’autre. Courir en lice dans la carriére. Courir la bague. Courir la quintaine. Courre le faquin. Courir les têtes. Courir les taureaux. Ceux qui couroient dans les Jeux Olympiques. Il courut avec lui dans cette carriére.
On dit fig. de Personnes de dignité égale, qui sont dans les mêmes emplois, qu’Ils courent la même carriére, pour dire, qu’Ils ont les mêmes prétentions. Cicéron & Hortensius couroient la même carriére.
On dit famil. que C’est à quelqu’un à courre, qu’on lui a donné à courir, quand dans quelque procès, querelle, ou contestation, son adversaire par adresse ou autrement, a pris sur lui quelque avantage qui le met en peine, & l’oblige de chercher les moyens d’en tirer raison, Il a reçû un affront, un soufflet, un démenti, c’est à lui à courre. J’ai obtenu un Arrêt qui lui donner a bien à courre. Je lui ai donné à courre, à courir.
Courir, Signifie encore, Aller çà & là, sans s’arrêter long-temps en chaque endroit. Il ne fait que courir. Il court depuis le matin jusqu’au soir, on ne le trouve jamais chez lui.
On dit parmi le peuple bassement, Courir la prétentaine.
On dit, d’Un homme qui est troublé d’esprit, ou qui est tout-à-fait extravagant, qu’Il est fou à courir les rues, à courre les champs.
On dit, qu’Une nouvelle court les rues, pour dire, qu’Elle est sue de tout le monde.
On dit aussi, Des femmes débauchées, qu’Elles courent les remparts.
On dit, Courre, courir le guilledou, pour dire, Aller en débauche. Il ne fait que courir le guilledou. Il est bas.
Courir, Signifie aussi, Couler. Il se dit, Des ruisseaux & riviéres, & des choses liquides, comme le sang, le vin, l’huile, &c. L’eau qui court. Le sang agité court dans les veines. J’ai senti une humeur qui me couroit le long de l’épaule entre cuir & chair.
Il se dit encore du temps. Le temps court insensiblement. Le terme qui court. L’année qui court. Il court sa vingtiéme année.
On le dit, d’Un certain terme, au bout duquel se doit payer ou effectuer quelque chose. On lui a donné trois mois de temps qui courent. Je n’ai que quinze jours, vous m’amusez par vos artifices, cependant le temps court. Ses gages courent depuis un mois.
On le dit principalement des intérêts de l’argent constitué. La rente court de tel jour. L’intérêt de cette somme court, court toujours. Les arrérages courent.
Courir, Signifie aussi, Etre en vogue. La mode qui court. Cette chanson couroit par la ville.
On dit, Au temps qui court, pour dire, Au temps present.
On dit, L’avis qui court, pour dire, L’avis qui a le plus de voix dans une délibération qui n’est pas achevée.
On dit encore, Faire courir des bruits. Il court un mauvais bruit, pour dire, Répandre des bruits, un mauvais bruit s’est répandu.
On dit aussi, qu’Il court bien des maladies. Il court beaucoup de fiévres malignes, de petites véroles, rhumatismes, &c. pour dire, qu’Il y en a beaucoup.
On dit, Faire courir un Livre, un Manifeste, pour dire, Le répandre dans le public.
On dit aussi à table, Faire courir une santé, pour dire, La faire boire par tous les convives. Faites courir cette santé. C’est la santé d’un tel qui court.
On dit, Faire courir la voix, pour dire, Demander les avis à ceux qui composent une Assemblée.
On dit, Faire courir le billet, pour dire, Envoyer un billet pour avertir, ou assembler ceux qui ont intérêt à quelque affaire. Et on dit d’Un homme, que Son billet court chez les p. 396Notaires, pour dire, qu’Il cherche de l’argent à emprunter.
On dit aussi, Faire courir le billet chez les Banquiers, chez les Orfévres, pour dire, qu’On fait donner avis de quelques choses volées, de quelques lettres de change perdues.
On dit, d’Un homme recherché par les Dames, que Les Dames le courent.
Couru, ue. part. Qui est poursuivi à la course. Un cerf, un liévre, un dain couru. Un voleur couru par le Prévôt, par les Archers.
On dit, Un pays couru par les ennemis, pour dire, Un pays où les Ennemis font des courses.
On dit fig. Couru, pour dire, Recherché, suivi. Ce Livre est rare & curieux, il est fort couru. Ce Prédicateur est fort couru. Il n’y a pas à moitié de telle marchandise, tant elle est courue.
Additions et corrections
Pag. 394. col. 2. lig. 12. Effac. Je courrois grand risque, & tout ce qui suit jusqu’à la fin de l’article.
Vous pouvez cliquer sur n’importe quel mot pour naviguer dans le dictionnaire.