toucher

4e édition

[I.] TOUCHER.

v. a.
↪ voir aussi : [II.] Toucher (n. m.)
■  Mettre la main sur quelque chose, à quelque chose. Les Laïques ne doivent point toucher les vases sacrés, toucher aux vases sacrés. Il ne faut toucher aux reliques qu’avec respect. Il ne lui a pas touché le bout du doigt. Ne touchez pas cela. Regardez cela, mais n’y touchez pas.
On dit, Toucher dans la main, pour dire, Mettre sa main dans celle d’un autre, en signe de réconciliation, d’amitié ou de conclusion de marché, &c. Le marché est conclu, il m’a touché dans la main. Nous nous sommes touchés dans la main. On les a réconciliés, ils se sont touchés dans la main. Il me tendit la main, & me dit, touchez là, l’affaire est faite.
■ Toucher, se dit aussi, en parlant du Roi, lorsqu’il applique & met la main sur ceux qui sont malades des écrouelles, en disant, Dieu te guérisse, le Roi te touche. On dit en ce sens absolument, Le Roi touche. Le Roi touchera un tel jour, une telle fête.
■ Toucher, se dit encore, en parlant Du contact qui se fait, soit immédiatement par le moyen des autres parties du corps, soit médiatement par quelque chose que ce soit. Toucher du pied. Toucher du bras. Il le toucha du coude. Il l’a touché avec son gant, avec son manchon. Il l’a touché de sa baguette. Tirer un coup de pistolet à bout touchant.
On dit en termes de Manége, Toucher de la gaule, pour dire, Aider de la gaule, en frapper légèrement sur l’épaule du cheval. Venez à courbettes par le milieu de la place, touchez de la gaule.
On dit, Faire toucher une chose au doigt & à l’œil, pour dire, La démontrer clairement, en convaincre par des preuves indubitables, telles que sont ordinairement celles de la vue & du toucher.
■ Toucher, se dit aussi, en parlant Du contact qui arrive entre toutes sortes de corps, lorsqu’ils se joignent tellement qu’il n’y a rien entre deux. Ces deux pierres se touchent. Le lambris & la muraille ne se touchent pas. Ces deux maisons se touchent.
En Géométrie, on dit, qu’Une ligne droite touche une courbe, Lorsqu’elle la rase en un seul point sans la couper. On dit aussi dans le même sens, que Deux courbes se touchent.
On dit, qu’Un vaisseau touche, Quand faute d’eau la quille touche le fond de la mer ou de la rivière, ou que par quelque accident il vient à toucher une roche, un banc de sable, &c.
On dit, qu’Un vaisseau a touché les côtes, a touché une telle île, pour dire, qu’Il y a mouillé, qu’il y a abordé.
On dit par exagération d’Un homme qui danse ou qui court légèrement, qu’Il ne touche pas des pieds à terre. Et en parlant de bons joueurs de paume, on dit, qu’Ils ne laissent pas toucher la balle à terre.
On dit figurément, qu’Une affaire ne touchera pas à terre, pour dire, qu’Elle passera sans difficulté.
On dit, Toucher, en parlant de certains instrumens de musique, pour dire, En jouer. Toucher l’orgue, le clavecin, le tuorbe, les toucher agréablement, délicatement.
On dit figurément, Toucher la grosse corde, pour dire, Parler de ce qu’il y a de principal & de plus essentiel dans une affaire. Et pour dire, qu’Une affaire est délicate, & qu’il n’en faut pas parler, on dit, que C’est une corde qu’il ne faut pas toucher. Il ne faut pas toucher cette corde-là.
On dit, Toucher de l’or, pour dire, L’éprouver avec la pierre de touche. Cette pistole est douteuse, elle a été touchée deux ou trois fois.
■ Toucher, se dit en parlant d’Une somme d’argent, & signifie, Recevoir. Il a touché ses appointemens. Je lui ai fait toucher une telle somme. Toucher de l’argent.
■ Toucher, signifie aussi, Atteindre à quelque chose. Il est si grand, qu’il touche au plancher. Il y touche de la tête. Il y touche de la main. Toucher du doigt.
On dit figurément, Toucher à un certain temps, pour dire, En être proche. Il n’y a pas quinze jours d’ici à Pâques, nous y touchons. Nous touchons au dernier moment. Le terme n’est pas éloigné, nous y touchons. Dans ces deux dernières acceptions, Toucher s’emploie neutralement.
■ Toucher, veut dire encore, Frapper pour faire aller, chasser devant soi ; & il se dit Des bêtes, comme vaches, bœufs, chevaux, &c. Il touchoit un troupeau devant lui. Il touchoit des bœufs devant lui. Touchez, cocher, allons plus vîte. Touche, cocher.
Dans le sens de Frapper, il se construit quelquefois avec Sur. Toucher sur les uns & sur les autres. On le dit aussi absolument. Touchez fort. Dans ces deux phrases, il s’emploie neutralement.
■ Toucher à quelque chose, signifie quelquefois, En prendre, en ôter. On ne touchoit au trésor de la République que dans les grandes nécessités. Je garde cet argent pour une affaire importante, je n’y veux pas toucher. Les assiégés n’ont pas encore touché à leurs magasins.
On dit encore, Toucher à une chose, à une affaire, pour dire, Y apporter quelque changement. Le Roi a révoqué tels & tels Édits, mais il n’a pas touché à celui-là. Le Conseil n’a pas voulu toucher à cet Arrêt du Parlement. On a retranché quelques Compagnies dans tels Régimens, mais on n’a point touché à celui-là. Assurément on n’y touchera pas. Ce Prince changea presque tout dans son État, mais il n’osa toucher à la Religion, toucher aux Lois fondamentales. Il n’a pas voulu toucher à cet article.
On dit d’Un homme qui est en partie auteur d’un ouvrage d’esprit, qu’Il y a touché.
■ Toucher, signifie aussi Exprimer. Ainsi on dit, qu’Un Poëte, qu’un Orateur touche bien les passions. Il y a dans cette Tragédie des endroits bien touchés.
On dit, Toucher une chose, une matière, pour dire, En parler incidemment dans un discours. Il a touché ce point-là fort adroitement. Il ne l’a voulu toucher qu’en passant, que légèrement. Touchez-en quelque chose dans votre Préface.
On dit d’Un tableau, qu’Il est bien touché, pour dire, que Les coups de pinceau sont donnés avec beaucoup d’entente, de force, de hardiesse, &c.
■ Toucher, signifie figurément Émouvoir. Dieu lui a touché le cœur. Dieu l’a touché, il s’est converti. Rien ne touche si efficacement que la parole de Dieu. Ce Prédicateur touche beaucoup. Cette nouvelle, cette mort l’a fort touché. Il en est sensiblement, vivement, extrêmement touché. Il en est touché jusqu’au fond du cœur. Laissez-vous toucher à la pitié, aux larmes des orphelins. Il en fut touché de pitié, de douleur.
■ Toucher, signifie aussi figurément, Concerner, regarder. Cela ne me touche point. En quoi est-ce que cela vous touche ? Je prends beaucoup de part, je prends un véritable intérêt à tout ce qui vous touche, à tout ce qui touche vos intérêts. Cet Édit touche tout le Clergé, toute la Noblesse.
Il signifie encore, Appartenir par le sang. Il me touche de près, il est mon cousin. Il ne me touche ni de près ni de loin.
■ Touché, ée. participe.
On dit aux jeux des Dames & du Trictrac, Dame touchée, Dame jouée ; & aux Échecs, Pièce touchée, Pièce jouée, pour dire, que Quand on a touché une pièce, il la faut jouer. On dit, Jouer au gage touché. Voyez Gage.
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