vivre

6e édition

[I.] VIVRE.

v. n. Conjugaison : (Je vis, tu vis, il vit ; nous vivons, vous vivez, ils vivent. Je vivais. Je vécus. J’ai vécu. Je vivrai. Je vivrais. Vis, vivez. Que je vive. Que je vécusse. Vivant.)
↪ voir aussi : [II.] Vivre (n. m.)
■  Être en vie. Tous les hommes et tous les animaux qui vivent sur la terre. Les oiseaux vivent dans l’air, et les poissons dans l’eau. Si nous vivons dans ce temps-là. Il a vécu cent ans. Saint Louis vivait au treizième siècle. S’il vit âge d’homme. Cesser de vivre. Être las de vivre. Ils vécurent ensemble.
Prov., On ne sait qui meurt, ni qui vit, se dit Pour exprimer l’incertitude où l’on est sur la durée de la vie et sur le moment de la mort. Il faut lui donner une reconnaissance de l’argent qu’il nous a prêté, car on ne sait qui meurt, ni qui vit.
Fig. : Il est toujours malade, il est dans des frayeurs continuelles, ce n’est pas vivre. Il ne vit pas, il ne fait que languir. On dit aussi, Ne vivre que pour soi, Ne songer qu’à soi, ne s’occuper que de ses intérêts ; et, dans des sens analogues : Ne vivre que pour servir Dieu, que pour étudier, que pour le bonheur des autres, que pour les autres. Je ne vis que pour toi.
Dieu vit de toute éternité, vit dans les siècles des siècles, vit par lui-même, se dit Pour exprimer que l’existence de Dieu est éternelle et indépendante. Les bienheureux vivront éternellement avec Dieu dans la gloire, Ils jouiront de la vue de Dieu pendant l’éternité.
Vivre, signifie figurément, Durer, subsister. Ainsi on dit, dans le style soutenu : Un si grand prince vivra éternellement dans l’histoire. La mémoire de ce conquérant, son nom, sa gloire vivra jusque dans la postérité la plus reculée. On dit aussi, Cet ouvrage vivra, Il passera à la postérité. Les mauvais ouvrages ne vivent que peu de temps.
Il se dit, en termes de Dévotion, par rapport à la disposition de l’âme qui est en état de grâce. Un pécheur converti vit de la vie de la grâce, vit d’une vie nouvelle. Dans l’Écriture sainte, il est dit, Le juste vit de la foi.
Vivre, signifie aussi, Se nourrir, soutenir sa vie par le moyen des aliments. Donner à quelqu’un pour vivre, de quoi vivre ; le faire vivre. Il n’a pas de quoi vivre. Il ne vit que de racines, que de légumes. Les oiseaux qui vivent de grains, de proie, de carnage. Cet homme-là vit de peu, vit sobrement. Il vit aux dépens d’autrui, sur le commun, aux dépens du commun. Il fait cher vivre dans cette ville.
Vivre de régime, Vivre avec beaucoup de règle, pour rétablir ou pour conserver sa santé.
Vivre à table d’hôte, Manger habituellement à une table commune où chacun paye tant par repas. Ils vivent en commun, se dit De plusieurs personnes qui n’ont qu’une table à frais communs.
Prov., Il faut que tout le monde vive, Il faut laisser ou fournir à chacun les moyens de pourvoir à son existence.
Vivre, se dit également en parlant De tout ce qui fournit les moyens de subsister, p. 945de se soutenir. Vivre de son bien, de ses rentes. Vivre de son travail, de son métier, etc. Vivre d’emprunt. Vivre d’aumônes. Vivre de rapine.
Fam., Vivre de ménage, Vivre avec économie ; et figurément, par plaisanterie, Vendre ses meubles pour subsister.
Vivre d’industrie, Trouver moyen de subsister par son adresse et par son savoir-faire. Il ne se dit qu’en mauvaise part.
Fig., Vivre d’espérance, Vivre dans l’attente de quelque bien, et se soutenir par cette attente.
Fig. et fam., Il vit de la grâce de Dieu, se dit D’un homme à qui on ne connaît aucun bien, ni aucune ressource pour subsister. Il se dit aussi D’un homme qui mange très-peu, et à peine autant qu’il faut pour se soutenir.
Vivre au jour la journée, au jour le jour, N’avoir pour subsister que ce qu’on gagne chaque jour par son travail.
Prov. et fig., Vivre au jour le jour, S’inquiéter peu du lendemain, être sans prévoyance.
Prov., Item il faut vivre, La nécessité de pourvoir à sa subsistance doit excuser beaucoup de choses que l’on fait, et que l’on ne ferait pas sans cela.
Vivre à discrétion, se dit Des soldats qui ont été envoyés dans un village, dans une ville, pour se faire traiter à leur gré par les habitants.
Vivre, se dit souvent Par rapport à la dépense qu’on fait pour sa table, pour ses habits, pour son train, et par rapport aux commodités ou incommodités de la vie. Vivre splendidement, magnifiquement, honorablement, noblement, grandement, largement. Vivre en grand seigneur. Vivre en prince. Vivre en gueux. Vivre avec économie. Vivre mesquinement, sordidement, pauvrement, étroitement, petitement, misérablement. Il ne vit pas selon sa condition.
Vivre noblement, Mener un genre de vie dans lequel il n’y a rien qui puisse déroger à la noblesse. Cette locution a vieilli.
Vivre, se dit aussi Par rapport à la manière de passer sa vie dans les divers états que l’on embrasse, dans les différents lieux que l’on habite, dans une situation heureuse ou malheureuse, etc. Vivre dans le célibat, dans le mariage. Vivre dans le grand monde, dans l’obscurité. Vivre à la ville, à la campagne, à la cour. Vivre chez soi, chez ses amis. Vivre dans la solitude, dans la retraite, dans le cloître, dans les camps. Vivre dans la joie, dans la tristesse, dans les plaisirs. Vivre heureux, content, tranquille. Vivre malheureux.
Prov., Vivre paix et aise, Passer sa vie tranquillement et dans l’abondance. Cette manière de parler a vieilli.
Prov., Il faut laisser chacun vivre à sa mode, Il faut que chacun en use, agisse comme il lui plaît, en ce qui le regarde. On dit de même, Chacun vit à sa mode.
Vivre, signifie encore, Se conduire, se comporter bien ou mal, eu égard aux mœurs, à la religion. Vivre en homme de bien. Vivre saintement, sagement. Il a toujours vécu sans reproche. Vivre régulièrement, religieusement. Vivre en bon chrétien. Vivre en libertin. Vivre licencieusement. Vivre dans la crapule, dans la débauche. Vivre mal. Il faut bien vivre pour bien mourir. On meurt d’ordinaire comme on a vécu. Vivre au hasard, sans prévoyance, sans réflexion.
Vivre bien avec quelqu’un, Vivre avec lui de bon accord, en bonne intelligence. Ils vivent bien ensemble. Et, Vivre mal avec quelqu’un, N’être point avec lui en bonne intelligence. Cette femme vit mal avec son mari. Cet homme vit mal avec ses voisins.
Vivre bien avec quelqu’un, signifie aussi, Se comporter avec lui convenablement, décemment, ne point manquer aux égards que prescrit le savoir-vivre. Quoique nous soyons en procès, nous vivons bien ensemble. Et, dans le sens contraire, Vivre mal avec quelqu’un. Il vit mal avec des parents auxquels il a de grandes obligations.
Fam., Vivre avec quelqu’un, signifie quelquefois, Être avec quelqu’un dans un état de concubinage. Il vit avec cette femme depuis longtemps. Elle vit avec un jeune homme.
On ne saurait vivre avec cet homme-là, Il est d’une humeur à laquelle on ne saurait s’accoutumer. Cet homme est aisé à vivre, est commode à vivre, Cet homme est d’un commerce doux et facile, il est aisé de vivre avec lui. Dans le sens contraire, on dit, C’est un homme difficile à vivre.
Savoir vivre, Avoir les manières du monde, savoir se conduire suivant les usages reçus parmi les gens bien élevés. Il a de l’esprit, il a fréquenté la bonne compagnie, il sait vivre. Cet homme est fort incivil, il ne sait pas vivre.
Substantiv., Le savoir-vivre, La connaissance et la pratique des bienséances et des usages reçus parmi les gens du monde. C’est un homme qui a bien du savoir-vivre. Il manque de savoir-vivre. On dit dans un sens analogue, Apprendre à vivre, Acquérir cette connaissance, s’instruire de ces usages.
Fam., Je lui apprendrai à vivre, Je le corrigerai, je le punirai de sa faute, de ses torts.
Donner tant aux soldats pour le bien vivre, se disait D’une certaine somme qu’on donnait aux soldats, dans les quartiers, dans les garnisons, pour les obliger à ne rien exiger de leurs hôtes au delà de ce que prescrivaient les ordonnances.
Vivre, se dit encore Par rapport au gouvernement politique, aux lois, aux usages du pays dans lequel on demeure. Vivre sous les lois d’un prince. Les lois, les coutumes suivant lesquelles nous vivons. Nous vivons sous un prince généreux. C’est ainsi qu’on vit dans ce pays sauvage.
En termes de galanterie, Vivre sous les lois d’une femme.
Vive Dieu ! Sorte d’affirmation tirée de l’Écriture sainte. Elle a vieilli.
Vive le roi ! Acclamation pour témoigner qu’on souhaite longue vie et prospérité au roi. Le peuple cria, Vive le roi ! On dit de même : Vive la liberté ! Vive la charte ! Vivent les braves ! Vivent nos libérateurs ! Etc.
Vive, est aussi un terme familier dont on se sert Pour marquer qu’on estime quelqu’un, qu’on fait grand cas de quelque chose. Vive un tel, c’est un galant homme. Vivent les arts. Vivent la Champagne et la Bourgogne pour les bons vins. Vive Paris pour la bonne compagnie et la bonne chère Vive le vin. Vive l’amour. Vive la joie.
Substantiv., C’est un vive-la-joie, qui n’engendre pas de mélancolie, C’est un homme joyeux, sans souci.
Qui vive ? Terme dont les sentinelles et les patrouilles se servent, Pour demander à toute personne qui approche ou qu’elles rencontrent, de quelle nation, de quelle armée, de quel parti elle est. On lui cria, Qui vive ? il répondit, France. On l’emploie quelquefois comme substantif masculin : alors il s’écrit, Qui-vive. Les deux troupes en vinrent au qui-vive.
Fig. et fam., Être sur le qui-vive, Être très-attentif à ce qui se passe. Il signifie plus particulièrement, Être dans un état d’alarme et de défiance. Il faut toujours être sur le qui-vive avec lui, se dit en parlant D’un homme susceptible et difficile à vivre.
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