venir

2e édition

VENIR

verbe n.
■  Se transporter d’un lieu à un autre. Il ne se dit que pour marquer le mouvement qui se fait d’un lieu esloigné au lieu où est celuy qui parle. Il est venu icy, ou simplement, il est venu. il viendra demain. il va venir. il vint à nous tout effrayé. le voilà qui vient. il vint à ma rencontre, au devant de moy. il vint à grandes journées. il vint en poste. venez çà. je viens pour vous dire, que .... quand nous viendrez-vous voir ? il vient d’Italie. je le rencontray qui venoit de Rome. je viens de la promenade. quel jour vient le courrier ? quel jour viennent les lettres ?
Il se dit aussi Du mouvement qui se fait d’un lieu esloigné à un lieu plus proche de celuy qui parle. Il est venu de Rome à Lyon.
Il se dit aussi du mouvement qui se fait d’un lieu esloigné au lieu où est celui qu’on fait parler. Cesar ordonna à Labienus de le venir trouver. Cesar fit venir une telle legion des Gaules.
■ Venir, Signifie aussi, Arriver au lieu où est celui qui parle, Quel jour vient le courrier de Bordeaux ?
Quelquefois Venir Se dit aussi du mouvement qui se fait d’un lieu proche à un lieu esloigné : mais ce n’est que lorsque celuy qui parle, invite un autre à l’accompagner. Je m’en vais à Rome, voulez-vous venir avec moy ? nous allons à la promenade, venez avec nous.
Il se construit quelquefois avec les pronoms personnels & la particule En, sans que cela change rien au sens. Dites-luy qu’il s’en vienne. nous nous en vinsmes ensemble.
Il se dit aussi Des choses inanimées. Il vient du vent de ce costé-là. ouvrez la fenestre il viendra de l’air.
On dit prov. Ne faire qu’aller & venir, pour dire, Estre tousjours en mouvement. Et, C’est un beau venez-y voir, pour dire, C’est peu de chose, c’est une chose qui ne merite pas d’estre remarquée. Il est bas.
On dit fig. Je le verray venir, il faut le voir venir, pour dire, Il faut voir ce qu’il fera, quel est son dessein.
On dit aussi prov. d’Un homme qui paroist tout neuf en quelque chose, qui est ignorant de ce qui se passe, & que tout le monde sçait, qu’Il semble qu’il vienne de l’autre monde. On dit aussi proverbialement dans le mesme sens, D’où venez vous ? de quel pays venez-vous ?
On dit prov. d’Une chose agreable à manger dont l’idée excite l’appetit, quand on en parle ou qu’on en entend parler, qu’Elle fait venir l’eau à la bouche. Cela se dit aussi au figuré, en parlant de tout autre chose. En luy parlant des richesses de ce pays-là, vous luy avez fait venir l’eau à la bouche.
On dit prov. Aprés la pluye vient le beau temps, pour dire, que Le beau temps succede à la pluye. Et on le dit aussi au figuré, pour dire, qu’aprés un temps malheureux, il en viendra un plus heureux.
On dit aussi prov. qu’Aprés la panse vient la danse, pour dire, qu’aprés avoir fait bonne chere, on ne demande qu’à se divertir.
On dit, que Les revenus viennent bien, pour dire, qu’Ils sont bien payez. Il a peu de revenu, mais le peu qu’il en a vient bien.
Et on dit figur. & prov. Faire venir l’eau au moulin, pour dire, Se procurer des avantages, de l’utilité à soy ou aux autres par son industrie, par son adresse.
■ Venir, Se dit aussi Des choses qui arrivent fortuitement & par accident. Il luy vint une grosse fievre. il luy vint une ebulition de sang. il luy vient tousjours beau jeu. il vint une bourasque, une tempeste. s’il vient quelque changement. il viendra un temps. il faut prendre le temps comme il vient. tout luy vient à souhait. cela luy vient bien à point. le bien luy vient en dormant. un malheur ne vient jamais tout seul. On dit prov. Tout vient à point qui peut attendre.
Au jeu de la paume, Un joüeur dit à son compagnon. Laissez-moy venir ce coup là, pour dire, Laissez-le moy joüer.
Et figur. on dit, que La balle vient au bon joüeur, pour dire, que Les emplois, les occasions de se faire paroistre arrivent ordinairement aux gens habiles.
Au jeu de Cartes, on dit, Laissez-moy venir cette main, pour dire, Laissez moy faire ce levé.
On dit fig. Cela vint à ma connoissance. il me vint une pensée. Et impersonnellement, il me vint en pensée. il me vint en teste. il me vint dans l’esprit, pour dire, J’appris cela. j’eus la pensée, &c.
■ Venir, Signifie encore, Arriver par succession, parvenir. Ce Roy vint jeune à la Couronne. aprés la mort du pere & de la mere, leurs biens viennent à leurs enfants. les biens qui viennent du costé du pere.
■ Venir. Se met aussi pour Arriver par le sort, escheoir. Je mettrois à la lotterie, si je croyois que le bon billet me dût venir. il ne me vient que des billets blancs.
■ Venir, Se prend encore, pour Estre issu, estre sorti. Il vient de cette Maison par les femmes. c’est un homme qui vient de bon lieu. il vient de bas lieu.
p. 764Il se prend aussi pour Proceder, emaner. De là vient qu’il y a si peu de bonne foy dans le monde. tous ces malheurs viennent de ce que… cela vient de bonne main. cela vient d’une personne que j’estime fort.
On dit prov. & fig. Ce qui vient de la fluste s’en retourne au tambour, ou ce qui vient par la fluste s’en retourne par le tambour, ou pour le tabourin, pour dire, que Des biens acquis par des voyes trop faciles ou peu honnestes, se despensent aussi facilement, & aussi mal à propos qu’ils ont esté amassez.
On dit proverbialement & populairement d’Un homme à qui il arrive quelque chose d’avantageux, sans qu’il se soit donné aucune peine, que Cela luy vient de Dieu grace.
On dit aussi d’Un homme qui devient riche sans rien faire, que Le bien luy vient en dormant.
■ Venir, Signifie aussi, Naistre, croistre, estre produit. Il ne vient point de bled en ce pays-là. on ne sçauroit faire venir de vin en cette Province. il viendra de belles tulippes de ces oignons. On dit fig. en ce sens, La raison luy viendra avec l’âge.
En parlant des choses liquides, contenuës en quelque vase qu’on tire, il signifie Sortir. Cela ne vient que goute à goute. le vin est au bas, il vient trouble.
■ Venir, Se dit aussi dans plusieurs differentes façons de parler, ou prov. ou fig. Ainsi on dit, En venir aux mains, pour dire, Commencer à se battre. On en vint aux mains avec les ennemis.
On dit, En venir aux reproches, aux grosses paroles, aux injures, aux coups, aux prises, pour dire, Se faire des reproches, se quereller, se dire des injures, se donner des coups, se colleter. Il en fallut venir à un procez, pour dire, Il fallut plaider.
On dit encore, Il faudra en venir aux extremitez, à la violence, à la force, pour dire, Il faudra se servir de la violence, de la force. Ils en vinrent aux menaces.
■ Venir a. Façon de parler ordinaire, qui se construit avec toutes sortes de verbes à l’infinitif ; comme, Venir à faire, venir à dire, &c. Sans rien adjouster de particulier au sens du verbe avec lequel elle se construit. Ainsi on dit, S’il venoit à mourir, pour dire, S’il mouroit. Si le secret venoit à estre descouvert, pour dire, S’il estoit descouvert. Nous vinsmes à parler, pour dire, Nous parlâmes. Il vint jusques à me declarer, pour dire, Il fit tant qu’il me declara.
On dit, Il en vint jusqu’à le menacer, pour dire, qu’Il le menaça enfin.
On dit De la mort, & de tout ce qu’on regarde comme necessaire, comme inévitable, Il en faut venir là. On le dit aussi De ce qu’on regarde comme plus expedient. Aprés avoir bien raisonné, vous verrez qu’il en faut venir là.
On dit, Ils en vinrent au point de faire telle chose, pour dire, Ils furent reduits à faire telle chose.
On dit, Les choses vinrent à tel point que … à un point que … si avant que … pour dire, qu’Elles furent portées à tel excés, si loin, &c. Il vint à un tel point d’insolence. pour dire, Il fut, il se rendit si insolent.
On dit, Venir au fait, à la question, à la discussion d’une affaire, à la conclusion, pour dire, Parler de la chose dont il s’agit, agiter la question, discuter, conclurre.
Et on dit Faire venir à la raison, pour dire, Reduire à la raison, mettre à la raison, soit par la persuasion, soit par la force.
On dit, Venir à une succession, pour dire, Heriter. Venir à une succession par teste, par souche, & venir au sol la livre, pour dire, Partager au sol la livre.
On dit, Venir à compte, à partage, à composition, pour dire, Compter, partager, composer. Venir à maturité, en maturité, pour dire, Meurir.
On dit d’Un enfant, qu’Il est venu au monde un tel jour, pour dire, qu’Il est né un tel jour, Et, qu’Il est venu à terme, pour dire, qu’Il est né au bout du terme.
On dit, Venir à rien, pour dire, Diminuer beaucoup, se reduire presque à rien, & c’est dans cette acception qu’on dit, qu’Une tisanne viendra à rien si on la fait trop bouillir.
Et on dit fig. Tous ces grands projets viendront à rien, pour dire, Tous ces grands projets n’auront aucune suite, aucun succez. Tous les profits qu’il esperoit sont venus à rien.
■ Venir bien. Façon de parler dont on se sert pour dire, Croistre, profiter. Cet arbre vient bien.
On dit aussi, qu’Une robbe, qu’un habit, qu’une perruque, qu’une coeffure vient bien à la taille, à l’air du visage, pour dire, qu’Elle convient bien. Et dans la mesme acception, qu’Une chose vient comme de la cire.
On dit aussi, que Des couleurs, que des nuances viennent bien ensemble, pour dire, qu’Elles s’assortissent bien ensemble. Le vert vient bien sur l’incarnat.
On dit d’Un enfant nouveau né, qu’Il est bien venu, pour dire, que La mere en est heureusement accouchée. Et lors qu’Une femme grosse a fait quelque cheute, quelque effort qui donne lieu de craindre qu’elle ne se soit blessée, on dit, qu’On craint que son fruit, que son enfant ne vienne pas à bien.
On dit aussi d’Une femme dont les enfants meurent tres jeunes, que Ses enfants ne viennent point à bien.
On dit, Venir à bout de ses desseins, de ses entreprises, pour dire, Y reüssir. Venir à bout de ses ennemis, pour dire, Surmonter ses ennemis.
On dit, Venir à la traverse, venir sur le marché, sur les brisées de quelqu’un, pour dire, Traverser, troubler un dessein, une affaire, marchander ce qu’un autre est en termes d’acheter, travailler à obtenir ce qu’un autre poursuivoit auparavant, & se servir des mesmes moyens que luy.
On dit dans le style familier, S’il alloit venir faute de lui. s’il en venoit faute, pour dire, S’il alloit mourir.
■ Venir de. Autre façon de parler ordinaire, qui se construit pareillement avec toutes sortes de verbes à l’infinitif, pour marquer un temps passé depuis tres peu. Je viens de le quitter. il ne vient que de partir. il vient d’expirer, &c.
■ p. 765A venir. Façon de parler dont on se sert pour dire, Qui doit venir, qui doit arriver. Le temps à venir. les temps à venir. les siecles à venir. les choses à venir. On le met quelquefois en un seul mot, Les temps avenir.
On dit en termes de Palais, Donner un avenir, pour dire, Donner une assignation pour venir plaider à certain jour. A-t-on donné un avenir. faire signifier un avenir.
■ Venu, ue. part. Il a les significations de son verbe. Soyez le bien venu. Terme de civilité familier, lorsqu’on reçoit quelqu’un chez soy, ou qu’on le rencontre qui arrive.
Et on dit, qu’Un homme est nouveau venu, pour dire, qu’Il est nouvellement arrivé.
Et en parlant d’Un homme qui est tout nouvellement arrivé, ou qui vient d’estre receu dans quelque societé, on dit, que C’est un nouveau venu.
On dit, Le premier venu, pour dire, Celuy qui est arrivé le premier.
Et on dit, Confier son secret au premier venu, pour dire, Le confier sans discernement au premier que l’on rencontre.
On dit aussi, Le dernier venu, pour dire, Celuy qui arrive le dernier.
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